Une autre approche
On peut penser qu'aujourd'hui la croissance économique industrielle a atteint ses limites. En prenant l'exemple de l'automobile, on s'aperçoit qu'en Belgique le nombre a doublé de 1970 à l'an 2000. La logique de la croissance industrielle qui est un phénomène exponentiel voudrait que ce nombre soit multiplié par 4 en 2030 et par 8 en 2060. Chacun en conviendra que cela n'a aucun sens et n'est d'aucune utilité. Ce qui est valable pour l'automobile l'est également pour toute autre production.
La récente crise pétrolière nous montre à souhait que sa production a du mal à couvrir la croissance des derniers pays émergents dans le système industriel comme la Chine et l'Inde ou de palier au surcroît de consommation dû à notre « flux tendu » Il ne faut pas oublier qu'une augmentation de vitesse entraîne une consommation supplémentaire d'énergie et de matière première; c'est une loi de la thermodynamique. Autres exemples de limites: L'humanité consomme aujourd'hui 20% de plus que ce que la planète peut nous donner en ce qui concerne les ressources renouvelables (ressources maritimes, forêts, agriculture). Pour obtenir 1 calorie de viande hors sol dans notre assiette il faut consommer 12 calories d' énergie non renouvelable. En réalité, nous détruisons le capital planétaire; chacun connaît les conséquences d'un tel agissement au niveau d'une quelconque entreprise.
De quels droits les Présidents Bush père et fils ont-ils décréter que le protocole de Kyoto allait à l' encontre de leurs intérêts? De quel droit les occidentaux consomment-ils 4 fois plus d'énergie que les Chinois ou 80 fois plus qu' un habitant du Golf du Bengale? Ces derniers ont tout à fait le droit de réclamer leurs parts du festin. Pour installer une croissance économique durable nous aurons besoin de beaucoup de ressources planétaires non renouvelables et particulièrement de pétrole; si nous attendons la fin du pétrole pour passer à l'acte, ce ne sera plus possible et on pourra considérer la fin de l'humanité. Jusqu'à présent, c'est la croissance industrielle qui a fourni les emplois et le niveau de vie aux pays industrialisés. Si tous les pays du monde devaient pratiquer de la sorte, nous aurions besoin de trois planètes terre.
Le système industriel est semblable à un avion dont les indicateurs sont au rouge, le crash n'est pas loin, à la différence près qu'une bifurcation nous est possible. Il nous a donné deux choses essentielles; d'abord la maîtrise des matières premières qui a aboutit à la technologie ensuite la démocratie de masse avec une citoyenneté sous un gouvernement des lois et non des hommes. Il a été un éclair très important dans l'histoire de l'évolution. Cependant, comme le disait Nicolas Hulot, poursuivre un tel système serait un retour à l'ère minérale qui signifierait la négation du vivant alors que c'est de lui que nous dépendons. C'est du système vivant que nous devons nous inspirer pour évoluer vers une croissance économique durable pour tous; il s'agit en quelque sorte de copier la nature.
Croissance économique durable.
Par la volonté des citoyens, les conditions d'un
développement conduisant au bien-être de toute l'humanité tout en consommant de
moins en moins de ressources planétaires pourraient voir le jour.
Il ne s' agit pas d' un retour en arrière ou de
restrictions de toutes sortes, une non croissance serait aussi dommageable que
de poursuivre la croissance économique industrielle qui a terminé de jouer son
rôle.
Un investissement humain et matériel dans
l'imagination et la création de nouveaux concepts, de nouvelles richesses et de
nouvelles technologies est de nature à atteindre ces objectifs. L'utilisation
massive des énergies renouvelables, que ce soit directement ou par l' intermédiaire
de la biomasse en est l'une des pierre angulaire. L' autre étant la diminution
de la consommation des ressources par une autre organisation de la création et
de la distribution des richesses. C'
est en quelque sorte une autre vision de la productivité: la productivité des
ressources.
La
productivité des ressources.
L' industrie considère la productivité comme étant
la capacité à produire des richesses en un temps donné sans considérations des
ressources planétaires consommées. Durant l'ère industrielle, l'augmentation
de la productivité a entraîné la mise au travail des machines et par conséquent une consommation supplémentaire de
ressources planétaires. Etant donné les limites de la croissance économique industrielle
face à notre planète finie, il est dès lors possible de considérer une autre
représentation de la productivité. On parlerait là d'un saut de qualité qui
nous ferait passer de la production matérielle à la production d' idées, de concepts, d' informations
capables d' améliorer le rendement énergétique des processus et de diminuer la
consommation des ressources par unité produite. Une façon de stimuler une telle
transformation dans les pays industrialisés semble être d'ordre fiscale.
La sécurité sociale est un système de solidarité
dans lequel les travailleurs cotisent
pour ceux qui, pour différentes raisons, ne travaillent pas. Cela n'a
rien à voir avec un système d'assurance, on a tendance à l' oublier. Aux yeux
des travailleurs, un tel système peut paraître injuste ou absurde, mais il au
moins le mérite d'exister; ce n'est qu' une étape vers quelque chose de plus
adéquat. Une société sans solidarité est vouée à l'échec.
Aujourd'hui, pour payer moins de charges
salariales, les entreprises restructurent à tours de bras. Ces restructurations
sont réalisées la plupart du temps par le remplacement des travailleurs par des
machines ou de nouveaux processus qui entraîne une consommation supplémentaire
de ressources planétaires. On substitue les ressources planétaires aux
ressources humaines alors que cela devrait être le contraire. Cet état de chose
met la sécurité sociale et par
conséquent la solidarité en péril. Si la sécurité sociale était financée par
des taxes sur la consommation d'énergie et de matière première non renouvelable
il en irait tout autrement.
Voici un texte tiré du livre "Rendre
confiance . Le manifeste libéral" page378
"Chacun peut aujourd'hui constater que la
travail est taxé à un tel point que son volume se réduit comme peau de chagrin.
Le niveau de taxation de toutes les pratiques de surconsommation de ressources
et des espaces ou de transfert des charges environnementales sur la
collectivité ou les générations futures est-il suffisant pour les décourager?
La question doit être débattue et les Libéraux la soulèveront, gardant pour
principe la mesure, l'équité et la justice distributive de toute
fiscalité".
Le débat est attendu avec impatience.
Ne serait-il pas possible d' instaurer une
allocation sociale généralisée financée par une fiscalité sur la consommation
d' énergie et des matières premières et laisser les citoyens s' organiser comme
ils l'entendent ? Cela libèrerait l'imagination et la créativité. Une main
d'œuvre moins chère et une consommation d'énergie et de matières premières plus
chère rentabiliserait le recours au développement durable pour le citoyen comme
pour les entreprises. Utiliser les ressources humaines, non plus pour étendre
une économie de marché de façon anarchique, mais pour développer la
productivité des ressources n' est pas là la clef du développement
durable?